Raviolis en folie

Publié le par Aixue

Hier, le 22 décembre, c'était le 冬至(dong1 zhi4), à traduire par le solstice d'hiver. Les chinois fêtent cette nuit la plus longue de l’année depuis la Période du Printemps et Automne, soit il y a environ 2500 ans… Et ce jour là, en Chine du nord, il faut manger des 饺子 (jiao3 zi) – raviolis, des 混沌 (hun4 dun4) - raviolis en soupe, ou des 汤圆 (tang1 yuan2) – raviolis sucrés dans une soupe alcoolisée.

 

Pourquoi tous ces raviolis ? Ma collègue Wang Ying m’a expliqué qu’il y avait un proverbe à Pékin qui disait « 冬至不吃饺子,小心冻掉耳朵 » : « Si tu ne manges pas de raviolis au solstice d’hiver, attention à ce que tes oreilles ne tombent pas gelées par terre ! »  Ca fait froid dans le dos, hein !!! Tout ça à cause d’un jeux de mots : « hiver » (dong1) et « geler » (dong4) se prononcent pareil… 

Quand je vous avait dit que les chinois et les français n’étaient pas si différents : bonne bouffe et jeux de mots. On est fait pour s’entendre ! Les traditions chinoises sont souvent à bases de jeux de mots, de ressemblance phonétiques… Avec le peu de syllabe existante dans la langue chinoise, c’est un peu normal, d’ailleurs (voir aussi le billet « Oui au 8, non au 4 » du 2 septembre). Mais du coup, ça les rend assez superstitieux car ils font des connections avec tout et n’importe quoi !

 

Plusieurs légendes se rattachent au solstice d’hiver. L’une d’elle se déroule pendant les invasions des Huns. Il y avait deux chefs Huns particulièrement cruels, Hun et Dun (« roune » et « doune » à la chinoise ;D). C’est pourquoi les chinois, un jour qu’ils devaient être passablement énervés, ont réduit de la viande en hachis, et les ont appelé Hun et Dun ! Après, il les ont mis dans de la pâte, les ont ébouillantés et les ont bouffé. Tiens, prend ça, Hun, un bon coup de dent, prend ça, Dun, t’aimes les sucs gastriques, hein ! Les premiers 混沌 hundun ayant été mangé le jour du solstice d’hiver, cette tradition s’est perpétuée depuis.

 

Une autre légende parle des 饺子jiaozi (« tiao zeu »), à propos des oreilles gelées, justement  : un jour de grand froid lors d’un hiver rude,  Zhang Zhongjing se rend compte que les oreilles de nombreuses personnes sont gelées. Il demande alors à son disciple de leur confectionner un plat à base de viande de mouton et de légume, de les envelopper de pâte et de leur donner la forme d’une oreille. Les malades mangent les raviolis, et réchauffés, leurs oreilles guérissent. C’est donc pour ça qu’on dit qu’il faut manger des raviolis pour garder ses oreilles en bon état.

 

Une dernière - que je vous raconte, il y en a sûrement des tonnes d’autres - légende tourne autour des haricots rouge : un homme nommé Gong Gongshi et qui avait un fils bon à rien. Le fils mouru un hiver, mais resta sur terre pour hanter les gens. Mais il détestait une chose : les haricots rouges. Du coup, les gens prennent l’habitude de manger des haricots rouges ce jour là pour éloigner le fantôme !

 

Toujours est-il que hier, on ne savait pas trop où manger des raviolis, donc on se dit tant pis, on n’en mange pas. Mais c’était sans compter sur une de nos amie qui voulait absolument en manger ! Du coup,  pour être prudents – je tiens à mes oreilles -, on est quand même allé manger des jiaozi. Mais le problème est que les chinois vont toujours au restaurant pour les fêtes (pour le nouvel an chinois, il faut retenir les tables plusieurs mois à l’avance si vous êtes plus de 3 ou 4, sinon arrivé le jour de l’an, vous avez plus qu’à rester vous morfondre chez vous devant des nouilles instantanées !!!), et bien sûr, tout le monde veut manger des jiaozi.

 

Or les jiaozi, il faut les faire au fur et à mesure. D’abord tu prend une petite boule de pâte, tu l’aplatie en galette, puis tu mets la farce dedans, et tu replie. L’un après l’autre. Au resto, bien sûr, c’est un peu à la chaîne : deux femmes aplatissent les galettes, 3 autres les remplissent selon les commandes. Et puis après tu fait bouillir pendant une dizaine de minutes… et bien sûr, comme il y a énormément de farces différentes (viande, poisson, œuf combiné avec toute sorte de légumes, des champignons au céleri en passant par le poireau, la tomate, le piment, le choux…), il faut faire cuire chaque sorte l’une après l’autre… Vous imaginez le truc quand chaque table demande 4 ou 5 sortes différentes ! Alors  on a attendu, attendu… et finalement, on les a eu. Ouf. On aura nos oreilles et le ventre bien rempli jusqu’au printemps. Mission accomplie. Jusqu’à la prochaine tradition…


Publié dans Culture & traditions

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M
Qu'est-ce que tu es marrante! lolll J'apprends plein de choses moi aussi, merci!
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A
Ben de rien ! Que tu t'amuses et que tu apprennes des trucs me font tous tres plaisir !
J
tu connais plus que moi maintenant!! <br /> ca fait longtemps que j'ai pas passer la fete de  DONG ZHI, envie de manger, chez nous, on mange pas de raviolie et de TANG YUAN, sais pas pourquoi,  mais quand j'étais à Canton, on mange toute la famille ensemble avec plein de plats et c'est  tout, pas comme les pekinais.
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A
Ah, oui, sur internet ils disaient qu'on mangeait des pates dans le Sud, c'est ça ? Ben en fait je ne connaissais pas avant que ma collègue m'en parle. Du coup j'ai fait des recherches et appris plein de choses !
E
Un moment que je ne passe pas....coup de fouet, :) <br /> je te souhaite de Bonnes fêtes de fin d'année <br /> Bizzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzz
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A
C'est pas grave, ca fait bien longtemps que je ne suis pas, moi aussi,  alle visiter tous vos blogs, vous devez m'en vouloir ! Je vais revenir tres vite !Bises et joyeux Noel